Camille Guitteau: “On n’en peut plus de voir bouteilles et gobelets plastique à usage unique sur le dancefloor.”

Un festival de 50 000 personnes génère 1,35 tonnes de bouteilles, 74 kg de pailles, 624kg de gobelets. Le tout en plastique à usage unique. Pour penser et inspirer une production événementielle plus respectueuse de l’environnement nous avons rencontré Camille Guitteau, éco-warrior et co-fondatrice de la fondation Bye Bye Plastic qui a pour objectif comme son nom l’explicite d’éliminer le plastique à usage unique dans l’industrie musicale à horizon 2025.

Camille, tu es la co-fondatrice de la fondation Bye Bye Plastic. Peux-tu nous parler de la genèse du projet ? Comment la connexion entre la dj et productrice Blond:ish aka Vivie-Ann Bakos et toi s’est-elle faite ?

Bye Bye Plastic est née de ce moment ras le bol où on n’en peut plus de voir s’amonceler les bouteilles, les gobelets de plastique sur le dancefloor en festivals. Ça ne faisait pas de sens ! La fête et la musique électronique créent des moments toujours positifs et des moments sociaux extrêmement forts mais qui n’avaient pas du tout d’accroche avec ce qui se passait en termes de production. Nous nous sommes dit que cela devait cesser de manière radicale ! L’opportunité de faire changer les choses nous a motivés. La rencontre avec Blond:ish s’est faite via le réseau shesaid.so, qui est un réseau de femmes travaillant dans l’industrie musicale. Nous avons commencé à travailler ensemble avant même de s’être rencontrées physiquement, ce qui est finalement très en accord avec l’identité de notre temps très en prise avec le digital et l’international.

Comment agissez-vous auprès des artistes et producteurs d’événements afin de réduire leur consommation de plastique ? 

Le projet a un an et demi et il est enregistré en tant que fondation depuis janvier dernier. Notre premier gros chapitre de travail a été envers les DJs que nous considérons comme le début de ce cercle vertueux, puisqu’ils ont une voix et une influence unique. Tenant compte de leur manque de temps, il fallait trouver des initiatives actionnables rapidement et facilement pour les sensibiliser et les engager à notre démarche ; pour cela on a réalisé un éco-rider, un PDF que les artistes peuvent ajouter à leur rider déjà en place dans lequel ils demandent que les événements auxquels ils participent n’utilisent pas de plastique à usage unique dans le DJ booth ou les backstages. L’idée de cet éco-rider est d’avoir cette petite action facilement implémentable par les artistes mais aussi de transformer cette action en logique collective, l’individuel se transforme en force collective. Nous avons d’ailleurs réuni plus de 1500 DJs ! Les deuxièmes acteurs sont les professionnels de l’événementiel, auprès de qui nous ne voulons pas être des avocats du changement sans être porteurs des solutions concrètes. Il y a beaucoup de greenwashing et de désinformation et se lancer dans secteur peut être vite décourageant et confusant. Si le professionnel souhaite s’orienter, nous pouvons le conseiller grâce à notre travail de fond pour trouver des fournisseurs d’alternatives au plastique unique qui correspondent à nos critères.

Avez-vous déjà eu des retours d’expérience ? Comment ont répondu les professionnels à votre démarche ?

 Tout le monde a répondu extrêmement positivement, les chiffres ont parlé d’eux-mêmes, ainsi que le relai que nous avons eu. Il y a une vraie prise de conscience et d’envie d’agir sur cette problématique. Il y a trois catégories de producteurs d’événements : ceux déjà très engagés dans la démarche, ceux qui avaient déjà commencé à y penser mais qui ne l’avait pas mise au premier plan et enfin ceux qui n’y sont pas encore. La logique collective va vraiment porter le changement et engager le dialogue pour faire grossir la demande autour de cette logique de réduction de plastique. Une envie globale de chercher et trouver des solutions mais aussi d’informer correctement.

Comment va fonctionner votre calculateur d’empreinte carbone lié à la consommation de plastique ? Quels sont les enjeux de cet outil ?

C’est un tout nouveau projet qui a commencé par une phase introductive de recherche. On s’est rendu compte qu’il y avait un manque de données sur la consommation de plastique dans notre industrie. Pour y remédier, l’idée est de formuler des données de départ qui soient communes et qui soient une base de travail et conversation collective. L’idée est de réaliser ce qu’un festival, un club avec une jauge donnée peuvent consommer en une seule journée ou à l’année en pailles, gobelets ou encore bouteilles en plastique afin d’avoir un début de compréhension mais aussi ensemble se fixer des objectifs de réduction à accomplir. Le confinement nous a permis de finaliser cette première étape d’investigation qui est le pré-projet du footprint calculator. Nous développons ce calculateur avec la start-up eeco.world à la fois pour les professionnels de l’événementiel et les festivaliers pour faire prendre conscience et quantifier cette consommation de plastique. Pour les professionnels il permettra également de tracker les progrès et aider à la réduction. L’idée est de commencer avec les pailles, gobelets, bouteilles d’eau et catering pour ensuite étendre à d’autres produits qui utilisent du plastique à usage unique. L’enjeu clé du calculateur de plastique correspondent à une mission d’éducation sur l’impact du plastique, pas seulement son empreinte carbone mais surtout ce qu’il deviendra en tant que déchet.

Quels sont les prochains projets de Bye Bye Plastic ?

Nous avons organisé le programme Sustainability du festival Abracadabra sur Twitch et d’ici quelques semaines nous aurons un show hebdomadaire sur l’environnement. Nous étions très contents de voir qu’il y a un public curieux et désireux d’apprendre plus, ce qui correspond à notre approche positive et possibiliste. L’innovation va nous faire sortir du plastique à moyen et long terme; plus nous sommes nombreux à les demander plus ces alternatives arriveront vite car la recherche s’adaptera au rythme de la demande.

As-tu un conseil à donner aux organisateurs français qui n’ont pas encore entendu parler de Bye Bye Plastic et qui souhaitent se lancer dans cette transition écologique ?

Je vais commencer par un compliment : je n’habite plus en France depuis longtemps et je réalise que nous sommes assez en avance, notamment sur les écocups que nous utilisons depuis plus de 10 ans alors que certains pays voisins les découvrent tout juste. Il n’y a pas de conseil type, tout est dépendant du contexte local, des moyens disponibles, de là où vous en êtes dans votre réflexion. Utilisez votre créativité au service de l’environnement, ainsi vous allez trouver des opportunités financières, des bonnes manières de communiquer, des façons d’innover.

Bye Bye Plasic vient de lancer une nouvelle enquête auprès des professionnels de l’événementiel pour rassembler les perceptions actuelles sur la consommation plastique dans l’industrie musicale ! Remplissez-la, c’est un premier pas de fait ! 

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