
PREMIERE | Drawbridge & Pal Parallax – Bestiary of the Enchanted Forest [Essential Delights Records]
Avec « Par-delà les sens », le DJ Atavi lance son nouveau label Essential Delights Records. Pour cette première sortie prévue le 28 octobre, 19 artistes de la scène française sont rassemblé·es à travers 16 tracks techno mentale et hypnotique, trance, bass deep et expérimentales. On y retrouve notamment Hayashi, 44hz & Soām, LITTLEFISH, Catartsis, mais aussi de jeunes talents issus de collectifs émergents. Aujourd’hui, on vous dévoile la track d’intro de la compilation, « Bestiary of the Enchanted Forest », fruit de la collaboration de Drawbridge et Pal Parallax. Avec une inspiration dub très claire, les deux producteurs ont mélangés leur univers en expérimentant autour d’une ligne de basse jouée au Moog, sur laquelle se posent différentes textures, éléments harmoniques et même une voix énumérant des bestioles imaginaires. À travers ses projets, le label cherche à se concentrer sur des sonorités mentales et prône des ponts entre les genres, se détachant des tracks purement pensées pour le dancefloor. Ce premier VA annonce donc un projet prometteur à suivre de très près. Rencontre avec Atavi, Drawbridge et Pal Parallax.
Pouvez-vous nous présenter Essential Delights ? Comment est né le projet du label ?
Atavi : Je suis DJ et membre du collectif toulousain Synchronia collectif et cela fait plusieurs années que j’ai ce rêve d’avoir mon label. J’aime le DJing et je pense que cette passion restera dans ma vie pour longtemps, mais à mes yeux l’impact du simple DJ sur la scène électronique est mineur comparé à l’empreinte que laissent les labels, les collectifs, les clubs, les festivals, les producteur.rices. J’aime cette scène et je veux apporter ma pierre à l’édifice, que cela soit professionnellement ou personnellement. J’avais le temps et l’espace mental de m’y consacrer cette année alors j’ai décidé de me lancer et j’ai commencé à travailler sur le projet en mars.
J’écoute beaucoup de genres électroniques différents : techno, trance, expérimentale, bass, ambient. J’aime tellement de styles que niveau DJing j’ai pu être perdu, ne sachant pas ce à quoi j’avais envie de me consacrer, me demandant si le fait de jouer de la techno à 140 BPM et de la trance à 160 BPM ne nuirait pas à mes tentatives de me développer davantage. J’ai décidé de jouer ce qui me plaisait et que cela devait être le seul critère. Pour un label, il faut se spécialiser davantage, avoir une DA claire. En l’occurence, cela a été facile. Que cela soit en écoute seul avec mon casque, en club / festival ou bien pendant que je mixe, les musiques électroniques qui me font le plus rentrer dans le moment présent et me sentir connecté à mon environnement sont des musiques que je qualifie de « mentales » ou hypnotiques. Voilà les sonorités auxquelles se consacre le label. Cela ne sera pas que des musiques pensées pour le dance-floor. L’idée aussi est de prôner un mélange des genres. Techno, trance, bass, expérimentale, ambient, tout sera représenté. La séparation des genres dans la scène me gêne quelques fois. Beaucoup de labels majeurs ont une DA proche, mais se dédient plus spécifiquement à un genre. Mais pourquoi devrait-on avoir d’un côté les techno « DJ tools » et de l’autre la trance et des sonorités plus expérimentales ? Peu importe leurs styles de prédilection, beaucoup dans la scène écoutent ce que font Rene Wise et Feral par exemple, que cela soit à 136 BPM ou à 160 BPM, alors je veux encourager à ce que tout cela se mélange davantage. Les artistes et labels qui mélangent des genres m’inspirent beaucoup, comme le fait Mama Snake avec Amniote Editions.
Pour ce qui est du nom, je voulais aussi appeler à un retour à l’essentiel, aux racines, à ce pourquoi un label existe fondamentalement, la musique et la musique seulement. Comme beaucoup de personnes, je me sens dépassé par toutes les infos, posts, stories, reels qui bombardent nos feeds Instagram et je me questionne souvent sur leur utilité pour la scène. Il y a une course à la communication la plus spectaculaire, la plus originale, mais est-ce que cela aide vraiment la musique elle-même ? La démarche de Underground Resistance au début de la techno à Détroit me parle : la mise en avant de la musique avant les artistes, l’anonymat parfois. Ils sortaient des vinyles sans rien écrit dessus, je trouve ça génial. Clairement, je n’avais pas non plus de quoi entrer en compétition avec tout ces labels, alors le minimalisme dans l’approche, dans l’identité visuelle et la communication s’est d’autant plus imposé.
Vous sortez le 28 octobre, le VA « Par-delà les sens ». Comment s’est fait la sélection des artistes ?
Atavi : Je n’avais pas d’exemple de labels dans mon entourage alors j’ai navigué à vue comme pour tout avec mon label. Il était clair d’emblée que la première sortie serait une compilation. C’est un format qui me plaît particulièrement, qui a une place historique dans la techno et a notamment participé à importer le son de Détroit à Berlin et en Europe. Il était clair aussi que je voulais que la première sortie soit dédiée à la scène française. J’ai donc parcouru mes playlists à la recherche de tous les artistes que j’aime, qui rentrent dans la DA et qui sont basé.es en France. J’en ai découvert certain.es durant le process comme LITTLEFISH qui m’a été recommandée par ABS8LUTE à qui j’avais demandé conseil ou Ocyra que j’ai invité en last minute quelques semaines avant la deadline de réception des pré-masters après avoir découvert sa sortie sur DE RIO. Je connais et écoute le travail d’autres depuis des années comme Iannis Rezgui, Drawbridge ou Jardinage alors ça a été une petite fierté de les avoir sur le projet. Je suis aussi super content de sortir un son de mon amie LEO, membre de Synchronia également, dont j’adore le travail et qui signe un banger et sa meilleure production à mes yeux.
Je me suis rendu compte que involontairement la VA dressait une sorte de panorama de la scène française actuelle. Cela va de Paris à Marseille, de Rennes à Nancy, avec des artistes membres de collectifs bien implantés ou en pleine ascension ou bien qui ont leurs propres labels. Il y a de la techno brute et hypnotique, de la trance, de la bass, des sonorités plus expérimentales et deep. Je suis fier du résultat final. Je tiens vraiment à remercier 44hz & Soām, AKZ & MTRZ, Catartsis, Drawbridge & Pal Parallax, Hayashi, Iannis Rezgui, Jardinage, Kamen, LEO, LITTLEFISH, Ocyra, Odium (FR), REV, satin, Smogo et TVNG pour leur confiance.
Pour Drawbridge & Pal Parallax, on dévoile aujourd’hui votre track « Bestiary of the Enchanted Forest » sur Technopol. Pouvez-vous nous en dire un mot ?
Drawbridge et Pal Parallax : Le morceau a été composé en une seule journée. Victor est passé au studio de Vincent, à un moment où il écoutait pas mal de dub et avait envie d’explorer cet univers. Il a proposé qu’on s’en inspire comme point de départ. De son côté, Vincent n’était pas forcément très familier avec le genre, ce n’est pas un style qu’il écoute ou pratique souvent, mais il y a vu l’occasion de sortir de sa zone de confort et d’expérimenter de nouvelles sonorités et méthodes de production. On a donc décidé de se lancer sans trop réfléchir, en suivant notre instinct, avec l’idée de créer quelque chose d’organique, à la croisée de nos deux univers.
L’élément fondateur du morceau, c’est une ligne de basse jouée au Moog, construite autour d’un effet de chute continue obtenu en baissant progressivement l’accordage d’un oscillateur. À partir de là, on a enrichi la production par couches successives : éléments harmoniques, textures, FX… jusqu’à poser les bases complètes du morceau. En touche finale, Victor a ajouté sa voix. On est partis d’une image : celle de la mante religieuse, qu’on a ensuite détournée en inventant tout un petit bestiaire imaginaire : mante agnostique, mouche hérétique, etc. Cette énumération un peu absurde a fini par donner son nom au morceau : Bestiary of the Enchanted Forest.
Atavi : J’écoutais surtout de Drawbridge ses productions rapides et plutôt trance comme « Go Fast In The Jungle » ou « Attack of the Sandworm » et je connaissais son côté plus expérimental alors je savais que je pouvais m’attendre à tout quand je l’ai invité sur la VA. Et puis le fruit de leur collaboration était ma musique préférée dans ses démos alors on a invité Pal Parallax qui a accepté. Je suis super content de sortir leur premier travail ensemble. Immédiatement, j’ai décidé que « Bestiary of the Enchanted Forest » serait l’intro de la compilation. Ce morceau représente parfaitement l’essence du label. C’est techno, mais très deep, avec des sonorités hypnotiques et des couches étonnantes comme cette voix qui ajoute vraiment quelque chose.
Comment votre collaboration a-t-elle vu le jour ?
Drawbridge et Pal Parallax : Nous nous sommes rencontrés lors d’une soirée, grâce à des amis communs issus du milieu de la musique. À l’époque, Vincent vivait encore à Paris. Victor avait eu l’occasion de visiter son home studio, et on s’était dit que ce serait sympa de collaborer un jour sur un morceau. Environ un an plus tard, Victor est passé par Rennes, où Vincent s’était installé entre-temps. C’était l’occasion parfaite pour enfin donner vie à cette idée.
Comment souhaitez-vous faire évoluer le label ?
Atavi : J’aimerais sortir le premier EP du label au début 2026 et une seconde compilation à l’été 2026, peut-être moins techno que celle-ci et encore plus mentales. J’ai déjà une liste bien longue d’artistes que je rêve d’avoir sur le label. Plus généralement, j’apprécie le concept des split EP / LP qui se fait beaucoup dans la techno. J’aimerais reprendre cela pour en accentuer l’aspect collaboratif en invitant deux artistes aux styles très différents à sortir des morceaux individuellement et à collaborer sur un morceau au minimum (plus si possible) et à remixer un morceau de l’autre évidemment. J’aime beaucoup également le concept d’inviter un collectif qui n’a pas son propre label à curate une sortie, comme a pu le faire Amniote Editions (encore ce label) avec Mala Junta en 2023. Cela rejoint l’idée de mélanger les genres et de prôner une collaboration dans tous les pans de la scène. C’est quelque chose que j’aimerais.